18 décembre 2007
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Pas parce que son intrigue serait inférieure à ce qu’il écrit habituellement, mais parce que Etat d’Urgence est un sacré pavé dans la mare de l’écologiquement correct et que Michael Crichton n’hésite pas à aller totalement à contre-courant du délire médiatique qui entoure le réchauffement climatique.
Dans ce roman, il met en scène une organisation écologique qui n’hésite pas à organiser des attentats terroristes afin de prouver au monde qu’elle a raison. Dans le rôle du Candide qui peu à peu va s’ouvrir à une autre vérité, un jeune avocat qui va se trouver enrôler dans une aventure de plus en plus complexe et dangereuse.
L’intrigue n’est pas exempte de défauts. Certains effets sont téléphonés et l’on devine assez rapidement que la disparition d’un des personnages n’en ait pas une. Autres soucis, certains protagonistes sont en fait réduits à des silhouettes parfois clichesques (l’acteur alcoolique qui finira de manière tragique, presque sadique, comme si Crichton prenait un malin plaisir à se venger de quelqu’un) et leurs motivations sont souvent floues. Enfin, comme souvent chez lui, certaines péripéties sont quelque peu tirées par les cheveux.
Mais là n’est pas l’essentiel. Il est clair que l’auteur a écrit ce roman non pas pour rajouter quelque zéro à son compte en banque mais pour exprimer son point de vue discordant, ce qui est somme toute devenu très rare.
Ainsi, l’un des personnages, Kenner, va démonter systématiquement les théories écologistes en vogue : le réchauffement climatique, la fonte des glaces, la hausse des océans, le mythe du bon sauvage, la disparition de la calotte du Kilimandjaro, le rôle du CO2, les prévisions météo à très long terme… Le procédé est toujours le même : le personnage laisse son interlocuteur parler, énoncer une vérité médiatique, du style « les scientifiques le disent » ou « tout le monde sait cela » pour ensuite démonter l’argument en citant systématiquement une étude ou un scientifique allant dans le sens contraire. Il n’oublie pas non plus de rappeler les erreurs des années 70 comme la théorie de la glaciation à venir, la disparition totale des forets, les 10 milliards d'êtres humains sur Terre en 2010...

Rares sont devenus les romanciers qui osent vraiment écrire ce qu’ils pensent et non écrire ce que les gens veulent lire. Dans la vogue actuelle de romans plus ou moins ésotériques, montrant l’Eglise cachant des secrets en rafale , Etat d’Urgence nous invite tout simplement à réfléchir sur l’écologie moderne, sur ses incohérences, sur ce qu’elle pourrait être si elle arrêtait d’être politique.
La monstrueuse bibliographie qui clôt l’ouvrage ne peut qu’inviter à la réflexion et au débat. Pas étonnant que la critique ait détesté le roman. Si vous voulez une petite idée des réactions qu'il a suscitées, allez donc faire un tour dans les avis des internautes sur le site de la Fnac. Pourtant l’auteur prend soin de parler d’une autre théorie scientifique qui eut ses adeptes, ses colloques, ses organisations, ses relais dans les médias et finalement son application : l’eugénisme. Par cet exemple, situé en annexe, il montre comment un emballement médiatique peut conduire à un désastre certain. Mais qui veut entendre les Cassandre quand ils ne vont pas le sens du vent.
Au-delà du divertissement certain, de l’exotisme (l’action se passe de l’Antarctique au Pacifique en passant par les grands parcs américains), de l’action (certains passages sont écrits dans un style cinématographique évident), Michael Crichton nous lègue un message évident : ne nous laissons pas manipuler, réfléchissons.
Par les temps d’aveuglement médiatique, ce conseil n’en est que plus précieux.
