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23 octobre 2009 5 23 /10 /octobre /2009 06:40

Le pitch : lorsqu’un super héros sur le retour, le comédien, se fait mystérieusement assassiner , l’équipe des Watchmen tente de comprendre le meurtre, malgré l’interdiction faite par le président Nixon de faire leur travail de justicier.

 

Watchmen était attendu par des millions de fans dans le monde depuis des années. Sortie en 1987 (si mes souvenirs sont bons), le Comics a lancé la mode des Graphic Novel de prestige (mais ne l’a pas inventé, puisque Claremont avait déjà sorti le fabuleux Dieu crée , l’homme détruit, un Graphic Novel consacré aux X-Men) . Alan Moore et David Gibson signaient là un classique instantané qui osait se focaliser sur le côté sombre des super héros (violence, sexualité, tendance à l’auto justice, voire fascisme) et montraient qu’une BD pouvait être aussi adulte que n’importe quel autre média.

 

Qu’allait faire Zack Znyder de ce joyau ? Simple, l’auteur du magistral 300 a tout bêtement respecté l’œuvre et en a amplifié le côté sombre, ne se souciant ni de la censure ni du politiquement correct.

 

Au final, non seulement, le film est totalement réussi, mais surtout il est la digne illustration du Comics, un chef d’œuvre de plus de 2h40 (et annoncé dans une version longue de 3h30 en fin d’année) qui mettra KO toute personne osant tenter l’aventure.

 

Car, il faut le dire, la force de Watchmen est aussi sa faiblesse. En refusant de caresser le spectateur dans le sens du poil, Znyder a pris le risque de s’aliéner le grand public. Celui-ci est-il prêt pour voir évoluer un géant nu (le Dr Manhattan) , pour voir deux super héros faire l’amour de manière très graphique, l’homme du couple ne pouvant manifestement combattre son impuissance que lorsqu’il est en costume, voir un déchaînement de violence dès que Rorschach ou Le comédien apparaissent à l’écran. Le succès moins important prévu du film est déjà un élément de réponse.

 

Violent, le film l’est, renvoyant même 300 à un conte de fée (j’exagère un peu, mais vous m’aurez compris) !! Les balles traversent les corps dans la douleur, les méchants explosent littéralement de l’intérieur, on coupe des mains à la scie électrique, on se brûle, on abat des femmes enceintes… Znyder prend un malin plaisir à montrer des scènes brutales, dérangeantes et aucunement « cools » ! Mais si tout est dans le comics,   son exagération sur un grand écran est une décision voulue par le réalisateur. Logique celui qui croyait voir une nouvelle aventure d’un super héros sympa soit quelque peu stupéfait.

 

Et ce n’est que l’aspect le moins « dérangeant » !! La scène où Le comédien tente de violer sa partenaire jette une sacrée ombre sur le concept du super héros. Finie la vision idyllique du justicier masqué et désintéressé. Ici, le super héros joue pour son propre compte, se sert de ses pouvoirs pour des raisons parfois immorales (le Dr Manhattan détruisant les Viets-cong !!) et le seul personnage vraiment intègre cache sa haine de l’autre sous un masque en perpétuel changement. Quand Rorschach s’acharne sur le tueur d’enfant, il ne fait que faire ce que le public aimerait faire s’il se trouvait face à un tueur d’enfant. Watchmen flatte nos bas instincts tout en déconstruisant pas à pas le mythe du justicier masqué.

 

Le film n’hésite pas non plus à y aller côté sexe. Si la scène entre le Hibou et le Spectre soyeux est filmée d’une manière torride, celle où le Dr Manhattan se « clone » pour satisfaire son épouse renvoie là aussi à des fantasmes bien étranges. La façon dont il raconte sa vie avant en évoquant sa première nuit d’amour avec sa première femme est une autre façon de détruire le mythe. Peut-on imaginer M. Fantastic et la femme invisible faisant l’amour ? ou Peter Parker et Mary Jane ? Tout ce qui est soigneusement caché dans les comics traditionnels est ici mis en pleine lumière : le Hibou est obsédé par Le spectre soyeux, mais n’ose le dire, Dr Manhattan méprise finalement la race humaine, Ozymondias est prêt à sacrifier des millions pour en sauver des milliards…

 

Mais ce qui est le plus impressionnant n’est pas forcément ces aspects, c’est surtout la fidélité à l’arrière-plan : comme dans la BD, Nixon est toujours président, la guerre froide est omniprésente, les USA sont gangrenés par la violence et l’administration américaine évoque plus un état totalitaire qu’une démocratie. En fait, le film montre à la fois les meilleurs et les pires aspects de l’Amérique, et l’on ne peut s’empêcher de trouver ce monde fascinant.

 

J’ai pu lire des critiques sur le manque d’action (10 minutes de baston sur 150 !! on fait mieux comme ratio) !! Cela prouve surtout que le matériel de base est respecté. Watchmen n’est pas un blockbusters classique où chaque bobine doit amener sa grosse scène d’action. Ici, on est dans la tête des personnages et les nombreux Flash-back ne sont là que pour entraîner encore plus le spectateur. Mais comme dans n’importe quel trip, la descente peut être brutale !! Ici, celui qui voulait voir Spider-Man 4 ou Hulk 3 ne peut être que déçu : le film ne lui fera pas de concession ni de plaisir. Au contraire, il le mettra devant ses idées les plus noires sur les super héros , sans le prévenir et sans prendre des gants !! Si 300 enrobait quelque peu son propos, ici le film est brut , sans fioriture et sans aucun avertissement.

 

Alors, oui, Watchmen est un film élitiste, qui s’adresse à un public averti, un pamphlet délirant à 150 millions de dollars, réalisé par un cinéaste ouvertement conservateur. En mettant en avant, les pires super héros de l’histoire, sur un plan éthique, en le mettant à nu (dans tous les sens du terme), Znyder a fait un film de fan pour les fans. Que le grand public n’ait pas tout à fait suivi n’a aucune importance. Watchmen est un véritable chef d’œuvre, une date dans l’histoire du cinéma 

(Page originale : Salla Obscursium Invocat

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commentaires

J
J'ai adoré ce film.Yves 
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